Classé à tort par certains libraires dans la littérature jeunesse, Averia est un monde complexe que Patrice Cazeault nous fait visiter à travers les convictions opposées de deux sœurs. Le lecteur saute d’un point de vue à l’autre tout au cours du récit. Au début, cela peut sembler étourdissant pour certains, mais ce procédé offre une vision d’ensemble que nous n’aurions pas autrement. L’emploi de la première personne peut aussi être contestable puisqu’on se coupe de certains détails, mais somme toute la narration n’en est pas affectée.
Les personnages sont bien étoffés. Les personnalités flamboyantes de Seki et Myr offrent de belles occasions pour complexifier la trame narrative. Petit bémol, un lecteur adulte aura parfois de la difficulté à croire au discours de Myr. À quatorze ans, il est rare que l’on expose des idées politiques dans un vocabulaire aussi développé. L’ardeur est parfaitement à sa place malgré tout. Les personnages secondaires sont aussi vivant que Seki et Myr ce qui laisse place à une saga formidable pour le lecteur qui sera impatient de lire la suite. Que ce soit aux côtés de Kodos le ténébreux ou Lainz le fougueux contrebandier, le lectorat féminin en aura aussi pour son argent.
D’ailleurs la grande force de Patrice Cazeault réside dans sa facilité à nous entraîner dans un univers lointain et complexe en restant accessible. Comparable à la profondeur du monde de Dune de Frank Herbert, Averia se révèle être un monde où les humains, bien qu’oppressés, s’organisent pour changer la situation. Le contexte politique est dépeint correctement même si le lecteur avide de science-fiction en aurait voulu plus. Qui sait peut-être aurons-nous ce privilège dans les livres suivants! De toute façon, le plaisir de lire une prose aussi bien maniée ne peut qu’augmenter avec l’usage.
«Lentement, je sentis chacune des fibres de mes
biceps se tordre pour fournir l’ultime effort de me soulever
une dernière fois. En me hissant désespérément, j’avais l’impression
que ma conscience s’était détachée furtivement de
mon corps pour guider mes muscles de l’extérieur.»
L’auteur crée d’ailleurs une ambiance en jouant de ses mots. Fort habilement, il peut décrire une rencontre avec le maître en art martial, homme zen et rempli de sagesse, puis changer l’atmosphère en l’espace de quelques mots bien choisis.
«L’épaisseur de ce silence remplit peu à peu la pièce
jusqu’à en compresser ma poitrine.»
Outre la bonne mise en texte, le rythme du récit coule bien. Le lecteur n’a pas le temps de s’ennuyer sans tomber dans l’excès de malheur. Même si le sort s’acharne sur les deux héroïnes, vous n’aurez pas l’impression que rien ne leur arrive de bien. Faudrait parfois le chuchoter à l’oreille de Seki et Myr mais bon, à leur âge, on est souvent convaincue que le monde est contre nous. Un point de plus en réalisme pour l’auteur!
En conclusion, Averia n’est donc pas qu’une simple saga de science-fiction, c’est une expérience. Laissez-vous emporter dans cet univers haut en couleur pendant cette hibernation qui s’annonce longue. Rien de mieux que de visiter une autre planète quand la température nous refuse sa clémence. Bonne aventure sur Averia!
«Il était trop tard, ma hantise m’avait rattrapée, s’était
infiltrée dans mes défenses et s’étalait au grand jour. Mes
pensées se transformaient en couteaux que j’empoignais
moi-même pour me taillader la peau, chaque coup s’enfonçant
plus profondément dans mes chairs, creusant des
plaies béantes d’où s’écoulait le venin qui se cachait dans
mes veines.»
Résumé : Seki vit sur Averia, une colonie humaine qui a été conquise il y a 20 ans lors de la guerre avec les Tharisiens. Malgré cela, elle s’accommode bien de l’occupation. N’a-t-elle pas la chance d’étudier à l’université?
Sa soeur, Myr, ne partage pas son point de vue. Pour elle, la présence des Tharisiens sur Averia est une abomination. Le seul moyen de mettre fin aux injustices que subit le peuple humain est de se rebeller contre l’envahisseur.
Mais voilà que Seki, intimement convaincue que la reprise des hostilités serait une erreur, se voit entraînée malgré elle dans un groupe de résistants. Les choses tournent mal. Une bombe explose. La spirale de violence s’accélère. Seki, qui doit assumer un rôle qu’elle n’a pas désiré, arrivera-t-elle à se sortir indemne de l’insurrection qui gronde dans la colonie d’Averia?
Titre : Averia – Seki (tome1)
Auteur : Patrice Cazeault
Genre : science-fiction
Éditeur : Ada
Date de parution : Février 2012
Note :
Intéressante découverte ce jeune auteur, va tu nous parler des suite Martine ??
Bien sûr! Je suis déjà en train de lire le 2e 😉